Lost Cities : Les Rivaux
Lost Cities : Les Rivaux est la quatrième itération du jeu culte de Reiner Knizia.
Tout comme ses prédécesseurs (Lost Cities original de 2010, Lost Cities le jeu de plateau et Lost Cities Duel), le jeu repose sur la même mécanique d'exploration, consistant à faire des suites ascendantes de cartes de mêmes couleurs les plus complètes possibles (afin de maximiser ses points de victoire finaux).
Du renouveau dans la continuité
Lost Cities : Les Rivaux s'avère néanmoins être le plus différent de la série puisqu'il se base sur un système d'enchères (emprunté à Traumfabrik du même auteur), via l'ajout de pièces de monnaie et d'une rivière commune de cartes.
On ne joue donc plus ici avec un certain nombre de cartes de départ et une pioche continue. Non, chaque joueur débute avec deux cartes paris seulement dans la main, et peut à son tour faire l'une des deux actions suivantes :
- Révéler phase visible une carte de la pioche au centre de la table (action découvrir)
- Effectuer une mise d'ouverture (action enchérir).
Une première mise déclenche alors une phase d'enchères où, tour à tour, chaque adversaire va alors avoir la possibilité de sur-enchérir ou de passer. Comme au poker, si au bout du premier tour de discussion, il reste plus d'un enchérisseur en jeu, on repart pour une nouvelle tournée de mises.
Dès qu'il ne reste plus qu'un joueur actif, la phase d'enchères se termine. L'heureux vainqueur peut alors récupérer et utiliser directement autant de cartes qu'il veut de la rivière commune dans ses explorations personnelles. Et en profiter pour jeter une carte dans la défausse, afin de gêner un adversaire potentiellement intéressé !
No risk no fun
Vous êtes donc en train de vous dire : Un souffle nouveau dans un jeu réputé, c'est donc forcément l'assurance d'un combo gagnant ?
Bah non, justement. Et ce, pour deux grosses raisons.
Déjà, la mécanique d'enchères tombe vraiment à plat, et s'avère beaucoup moins stratégique qu'espérée. Car vu le fait qu'on ne peut pas conserver de cartes, on se battra toujours pour les petites au début, et les grosses valeurs à la fin. Moult possibilités tactiques (ironie).
Rajoutez à cela que vous rencontrerez toujours deux types de joueurs qui cassent l'ambiance : Les solitaires avares qui se concentrent uniquement sur leurs explorations et qui ne rentreront en interaction que pour remporter (absolument) les cartes qu'ils désirent. Et les taquins, qui auront pour seul plaisir de vous empêcher de remporter des enchères, même si les cartes ne les intéressent pas du tout.
Ce qui fait que la plupart des phases d'enchères tournent souvent à la démonstration de celui qui a le plus de pognon à l'instant T. Et franchement, c'est loin d'être l'ambiance Intervilles. Avec Guy Lux qui insulte la technique et les vachettes qui transpercent les candidats à coup de corne bien placée.
Et surtout, le gros défaut de Lost Cities : Les Rivaux, c'est qu'il est terriblement... vieillot. Dans son approche, son design, ses mécaniques.
Faire des suites de cartes de la plus petite valeur à la plus grande, c'était peut-être sympa en 2010, lors de la sortie de la première version. Mais en 2019 (le jeu est sorti l'année dernière)... pffffiou ça manque quand même d'originalité et de sex-appeal.
Pour dire, c'est la première fois que certains des joueurs de mon cercle habituel, plutôt tolérants d'habitude, m'ont dit en pleine partie qu'ils ne voit pas l'intérêt du jeu. Limite qu'ils se faisaient royalement ch... (ils sont très polis et aimables après un verre d'Orangina dans le nez).
Et j'avoue que mon constat est un peu le même. A deux, Lost Cities : Les Rivaux n'a juste aucun intérêt ludique. Si vous êtes fan du jeu, vaut mieux vous tourner alors vers la version Duel, beaucoup plus adaptée. A grande tablée, Lost Cities : Les Rivaux n'est qu'opportunisme, démonstration de force, et victoire hasardeuse. Pas le meilleur candidat si vous cherchez un jeu court, interactif et un minimum tactique.
Ce jeu est pour moi vraiment une énigme. Car Reiner Knizia n'est pas né de la dernière pluie (d'auteurs). Et il connaît normalement depuis longtemps la recette pour faire des petits jeux facile d'accès qui tournent.
Je suis donc pas loin de me demander si le monsieur n'a pas un peu sombré dans la facilité. Reprendre l'un de ses best-sellers, en y intégrant une routine récupérée d'un autre jeu maison. C'est facile pour s'assurer des ventes et finir la véranda de sa troisième maison secondaire dans le Larzac allemand. Voir pour profiter de gentils joueurs devenus un peu malgré eux de dociles consommateurs avec le temps. Je n'irai pas jusque là, mais j'attends avec impatience le prochain jeu de l'auteur allemand pour m'enlever ce goût désagréable en bouche.