Room 25
Bon oui je sais, Room 25 n'est pas vraiment de toute première jeunesse. Mais quand on a la chance de pouvoir enfin y jouer pour la première de sa carrière ludique seulement il y a quelques semaines, on ne boude pas son plaisir. Et comme dirait mon (défaut) grand père maternel : Vaut mitard que jamais. Un jeu de mots pourri certes, mais c'était un adepte du grand banditisme, donc j'ai le droit.
Comme 25 millions de chroniqueurs avant moi, la comparaison la plus évidente que l'on puisse donner pour expliquer le "concept" Room 25 est le film Cube. On se réveille prisonniers au centre d'un complexe mystérieux résolument avancé technologiquement, et le but est d'en trouver la sortie indemne. Cela pourrait être simple si le temps n'était pas compté, que nous ne connaissions au départ que le contenu de la salle de départ du plateau de 5x5 cases du jeu, et que les salles n'avaient pas tendance à se déplacer. Autre petit détail qui a son importance aussi, certaines salles ayant la fâcheuse tendance à vouloir nous découper au laser ou nous brûler vif. La course en avant n'est pas conseillée, sauf si vous êtes du genre masochiste. Bref, le film n'est pas du genre romantique, et Room 25 est du même registre poétique.
Pour autant, malgré son postulat de départ et son thème "gorisant" (j'adore inventer des mots),Room 25 s'avère être un vrai jeu "d'ambiance", aux règles extrêmement limpides et rapides à expliquer. Chaque tour comprend une phase de programmation et une phase d'action. Lors de la première, les joueurs sont invités à placer un ou deux jetons d'action face cachée qui sont dévoilés ensuite dans l'ordre du tour à la phase suivante. Il n'y a que quatre actions possibles : Regarder secrètement le contenu d'une pièce adjacente (en ne pouvant dévoiler aux autres que le niveau de dangerosité de ladite salle), se déplacer d'une pièce, pousser un joueur dans une pièce adjacente, ou déplacer une rangée / colonne du complexe (à la Labyrinth). N'importe qui peut y jouer, tant qu'il n'a pas des nausées dès qu'il voit une goutte de sang dans un épisode de Navarro.
Et si j'ai toujours trouvé sur le papier que Room 25 était simpliste, dans les faits l'ensemble fonctionne admirablement bien. Une grand part du plaisir du jeu vient de se besoin d'anticiper, de prévoir le mouvement des autres joueurs (lié à la phase programmation), mêlé à cette course désespérée à la prudence. Car c'est bien beau de vérifier une salle avant de s'y engouffrer, mais le temps tourne, et de toute façon, pas certain que cette pièce reste au même endroit quand le jeu revient à nous.
Le jeu offre depuis sa réédition (saison 2) le luxe de plusieurs modes de jeux (coopératif, compétitif, mode par équipes...) et des ajouts appréciables, comme des salles plus complexes, le jeton adrénaline (pour déclencher une troisième action exceptionnelle une fois dans la partie) ou des personnages disposant chacun d'une capacité spéciale. Impossible de faire le tour du jeu en deux parties, surtout que suivant la personnalité des gens à table et la mise en place aléatoire au départ (avec forcément pas toutes les tuiles salles du jeu), cela créé une expérience différente à chaque partie.
Indiscutablement, rien ne vaut le mode incluant des "traitres", des prisonniers qui finalement trouvent plus sympathiques de finir leur vie dans le complexe en tentant de mettre fin à celles des autres. Dans ce mode, chaque joueur tire au départ un rôle caché. Le but des "gentils" est toujours de trouver cette maudite salle Room 25 et de s'échapper, et celui des "méchants" devient de se débarrasser d'au moins deux épris de liberté, sans se dévoiler trop vite sous peine de finir aussi en charpie.
Suspicion, mensonges, coups fourrés se rajoute dès lors au cocktail déjà bien agréable en bouche du jeu de base. Et c'est de loin ma partie la plus mémorable, et le mode que je conseillerai à chaque tablée qui voudrait s'essayer au jeu.
Ce qui fait qu'avec Room 25, on passe un super moment. On stresse, on rit, tout en tentant de débusquer le rôle de chacun sans oublier de se désaltérer (car passer de salle en salle, c'est quand même sportif). Les parties sont hyper interactives, la tension est vive jusqu'au bout. Impossible dès lors de ne pas se dire que Room 25 a indiscutablement sa place au royaume des jeux de intermédiaires, funs et hyper rapides à sortir, que l'on peut sortir pour des tablées jusqu'à 8. Et si on omet les jeux d'ambiance pur, il n'y en a pas tant que ça.
Mais la tuile, le hic, la boulette, c'est que ce mode souffre malheureusement d'un défaut désastreux : Si les méchants ne se trahissent jamais (en donnant une fausse indication ou en tuant précipitamment un autre joueur), il est absolument impossible de découvrir leur identité, et ils leurs suffit de cueillir les gentils à la fin pour empocher une victoire quasi certaine. Bien sûr, on peut essayer de sécuriser la sortie au maximum, ou compter sur la chance pour qu'un vilain périsse de lui même ou soit trop loin pour agir. Mais c'est quand même beaucoup plus compliqué pour les "gentils" dans ce cas là, et c'est ballot. Quel dommage qu'il n'y ait pas une salle, un pouvoir, une action, permettant de pouvoir par exemple jeter un œil au rôle d'un joueur, ou de forcer à se dévoiler. Pas une mécanique évidente à intégrer certes, mais cela aurait aussi rajouter du piment supplémentaire. Si d'ailleurs l'auteur lit un jour ma critique et la trouve intéressante de la sortir en extension, je ne suis pas contre une petit commission ...
Ce défaut semble heureusement trop déterminant que s'il y a au moins 2 traitres à la table, un seul semblant plus gérable. Room 25 reste néanmoins un must-play/have tant il est convivial, offre une rejouabilité assurée dans sa version étendue (indispensable selon moi), et ce malgré un design et une thématique de base qui peuvent laisser un panel de joueurs hermetico-sceptiques.