
On pense souvent que le plus difficile pour un gang de voleurs d'œuvres d'art réputés est de réaliser un casse mémorable. À tord. Car le plus compliqué, c'est indiscutablement de se partager le butin sans trop de douleurs ni rancune. Et c'est toute l'idée derrière Art Robbery, la toute dernière mini boîte de chez Helvetiq Games.

Dans chacun de quatre tours d'une partie, vous allez en effet jouer à un jeu pour vous partager à chaque fois un type de butin, représenté par des jetons spécifiques allant de 0 à 5 disposés en amont au centre de la table.
Certaines des tuiles ont des petits points blancs dessus qui représentent des alibis. Et ces marqueurs sont du genre "important" car le joueur qui en possède le moins en fin de partie est embarqué par la police et ne participe pas au décompte de points, tout simplement !

Le jeu intègre un paquet de cartes dédié au partage. Chaque joueur en possède 5 en tout temps et le joueur actif n'a pas d'autre choix que d'en jouer une, récupérer un jeton du centre de la table correspondant puis défausser la carte à son tour.
Toute la subtilité d'Art Robbery vient du fait que s'il n'y a pas de jetons adéquats dans la zone commune, il peut en voler un à un adversaire. Et c'est là où l'interaction prononcée très "rentre-dedans" d'un titre très familial de nature se mêle à une gestion du timing plus fine que laisse présager le titre de prime abord.

Car chaque manche se terminant immédiatement dès que le dernier jeton central est récupéré, il y a en effet une vraie montée en tension qui grandit au fil des tours, et vous n'aurez pas d'autre choix que de bien calculer vos coups afin de tenter de repartir avec un minimum de richesses.
Si on combine cet aspect à une gestion de main plutôt prise de tête (car il faut réussir à jouer ses "bonnes cartes" au bon moment) et une double course aux points (victoire et alibis) vraiment savoureuse, on obtient un vrai et bon jeu de "conquête" riche en émotions diverses.

Reste qu'Art Robbery est du genre impossible à maîtriser de bout en bout, le hasard de la pioche et votre talent d'anticipateur ne pouvant pas toujours contrer les aléas des décisions de chacun, surtout à 4 joueurs. Si l'imprévisibilité générale du jeu (surtout en fin de manche) se montre plutôt jouissive, il y a de grandes chances que vos plans tombent souvent à l'eau, un adversaire ayant forcément la carte pour vous voler ce jeton de forte valeur, qui vous permet de garder votre boss, ou ce double alibi qui vous sauverait d'une fin anticipée.
Il faut donc prendre Art Robbery pour ce qu'il est : Un petit jeu de cartes de remplissage au thème décalé dont l'issue est beaucoup moins important que son déroulé. Et si vous êtes client, c'est l'une des bonnes pioches de cette année pour moi, surtout si vous comptez y jouer à 3, la configuration qui a le mieux fonctionné à la maison !


