
Bienvenue à Dale, cette ville du monde imaginaire de Daymiria où le commerce est roi. Le grand concours annuel va bientôt se tenir afin d'élire celui qui méritera de rejoindre la célèbre guilde des commerçants extraordinaires, le graal de tout marchand qui se respecte.
Il est donc l'heure de montrer vos talents en négociation, marchandage et gestion de stock pour réussir à monter un stand complet avant tous vos concurrents... et ainsi récupérer le sésame tant convoité !

Fast building
Derrière cette imagerie fort agréable se cache un petit jeu de de deckbuilding vif et léger de 110 cartes composé de 6 jeux d'animaux de 15 cartes chacun plus un lot de cartes neutres. La première subtilité intéressante livrée par La Vallée des Marchands vient avant la partie : il faut préparer la pioche commune ainsi que les decks individuels en sélectionnant autant de familles (plus une) que de joueurs.
Chaque animal proposant un style de jeu différent (les ratons favorisent le conflit, les aras rouges permettent de manager sa main...), ce choix initial va avoir une incidences sur les bonnes stratégies à adopter et sur sa manière de jouer globalement sa partie.

Côté mécanique, La Vallée des Marchands se base sur de la "construction de paquet" conventionnel. À son tour de jeu on tire cinq cartes, puis on les utilise pour leur capacité spéciale ou comme monnaie pour en acheter d'autres du marché commun présent au centre de la table.
Moins courant toutefois, le fait que toutes les cartes non utilisées durant un tour reviennent dans sa main, et qu'une carte achetée fait le même trajet. Les achats en deviennent plus impactant, puisque qu'on peut les utiliser dès le tour suivant, et les débuts de parties beaucoup plus dynamiques qu'accoutumée.
Là où le jeu passe un cap dans "l'originalité", c'est dans la possibilité, que dis-je, l'obligation, de savoir maîtriser la déconstruction de son deck.

Car pour gagner à La Vallée des Marchands, il faut réussir avant les autres à réaliser huit étales de cartes, allant de 1 à 8, dans l'ordre, en s'aidant de son paquet personnel. Forcément, on passe son temps à jongler entre l'envie de conserver des cartes pour utiliser sa valeur ou son pouvoir dans des tours ultérieurs, et le nécessité de s'en délester pour réaliser ces fameux étales.
Contraintes supplémentaires à prendre en compte au passage, on doit obligatoirement poser le bon nombre de points dans le même tour suivant le niveau de l'étale (5 points de cartes pour le cinquième niveau par exemple), et utiliser une seule couleur de cartes par étale, hors cartes spéciales.
Chaque joueur a toutefois le droit de se défausser d'autant de cartes qu'il le veut pour pouvoir en récupérer autant de son deck. Mais il perd alors un tour précieux. Un choix pas toujours facile à prendre, surtout quand c'est une course.

A beautiful world
La Vallée des Marchands est une très belle réussite selon moi. Que ce soit déjà visuellement, l'univers ne laisse pas indifférent. Sami Laakso, à la fois auteur et designer sur le projet, a eu la bonne idée de partir sur une direction artistique très typée "anglais" et aux fortes tonalités pastelles qui sort des sentiers battus, mixé à une dose d'anthropomorphisme qui fait toujours son petit effet, que l'on soit petit ou grand.
L'autre grande force du jeu, c'est sa rejouabilité. Les six decks de la boîte de base sont assez différents pour offrir des combinaisons variés pour modifier les sensations de jeu, et ne pas avoir l'impression d'en avoir fait le tour en deux parties. Bien sûr, si vous appréciez La Vallée des Marchands, je ne serai trop vous conseiller de jeter un œil aux extensions L’ère des Maîtres du commerce et Les Castors Communs Méthodiques (les seules en français pour l'instant), qui rajoutent de nouvelles familles, mécaniques et décuplent vraiment les possibilités.

Bravo à l'éditeur Bragelonne, qui a cru assez au projet pour le sortir en français en 2018, alors que La Vallée des Marchands avait connu une première vie du genre anecdotique, sans connaître un engouement fou lors de sa campagne Kickstarter... en juillet 2015, récoltant "seulement" 30% de plus que le petit budget espéré par Snowdale Design.
Je ne suis forcément plus très objectif à ce stade de la critique, mais vous aurez du mal à trouver un meilleur jeu de cartes aussi subtil, attrayant et transportable que La Vallée des Marchands. Bien sûr, les joueurs experts le trouveront trop léger, et les fans d'interaction pesteront contre le manque de cartes pouvant aller chatouiller les moustaches de ses voisins (un "défaut" que corrige cependant les extensions).
Mais il y a quand même de quoi cogiter et se faire quelques bassesses, le profil de jeu parfait donc pour les joueurs familiaux ou un peu plus habitués qui cherchent à passer un chouette petit moment ensemble, masqués bien évidemment !


