
La prohibition à tous les coins de rue, une guerre de gangs sur fond de contrebande d'alcool, ... c'est dans un new yorkais des années 20 explosif et tourmenté que vous allez évoluer avec MOB : Big Apple. Un titre particulier pour un jeu pour deux joueurs exclusivement qui décide de proposer un cocktail de mécaniques assez varié pour le genre.

La course à la majorité va cependant driver l'essentiel de vos décisions. Le plateau central affiche six quartiers (Bronx, Harlem, Hell's Kitchen, Little Italy, Chinatown et Brooklyn) dans lesquels vous allez essayer d'envoyer un maximum de vos hommes de main pour remporter les caisses de contrebande disponibles. Si une partie se déroule en 3 manches, ce n'est toutefois qu'à la toute fin de la dernière manche que le butin sera réparti.
Tout le sel du jeu va donc consister à placer vos troupes, envoyer de nouvelles cargaisons et jouer de vos jetons espions (dont les valeurs ne seront dévoilées que lors de l'affrontement final) pour tenter de prendre le contrôle définitif de la ville.

Une manche débute toujours par l'arrivée de 20 hommes de main devant chaque camp, et prend fin quand les deux adversaires sont à cours de main d'œuvre ou ne peuvent plus agir. Tous les hommes qui survivent entre deux manches restent sur place et servent de "base" de construction stratégique pour la suite de la partie.
Le tour d'un joueur se compose toujours de deux phases. Dans la première (optionnelle), il lance le dé noir et le dé blanc et peut affecter soit un nombre d'hommes de main de la valeur du dé blanc au devant de l'emplacement quartier indiqué par le dé noir, soit l'inverse. Dans la deuxième phase, il est invité à activer l'un des emplacements encore libres du plateau actions dédié en y plaçant le nombre d'hommes de main indiqué.

Ce plateau permet un large éventail d'agissements, comme déplacer un maximum de 3 homme d'une voiture à une autre (le "au devant d'un quartier" plus haut), ou vider une voiture dans un quartier (cf. placer les meeples sur la case quartier). Vous pouvez aussi par ce biais déplacer un jeton espion ou une caisse sur le quartier de votre choix, ou bien bouger le jeton procureur d'un cran dans votre direction (il a le droit à une piste spécifique).
Certaines cases affichent des petits icônes bonus qui, pêle-mêle, peut vous offrir le droit d'ajouter une nouvelle caisse, retourner un jeton espion ou tirer sur une voiture adverse.
Une fois que les joueurs n'ont plus d'hommes de main dans leur entrepôt, ceux encore "en voiture" sont placés dans les quartiers attenants. On résout alors la piste procureur (qui offre des actions bonus au joueur qui le contrôle) puis on passe à une résolution de conflits dans chaque quartier, avec pour règle que chacun perd autant d'hommes de main que celui qui en avait le moins à cet endroit.

Et ce melting-pot de saveurs mécaniques est une vraie réussite selon moi.
Au contrôle de zone, au placement d'ouvriers très euro se mêlent se mêlent du bluff, du jeu d'influence et le hasard des dés (voitures, tirs) pour des parties au final aussi tendues que très agréables.
C'est certain, il est très compliqué dans MOB : Big Apple d'établir une stratégie au long cours, voir même de conserver un minimum de certitudes sur une manche (surtout au début), tant le visage d'un quartier peut changer en un tour, les espions faces cachés peuvent tout renverser en fin de partie ou les différents tirages peuvent malmener ses désiratas initiaux.

Mais si le contrôle n'est pas total (et peut faire fuir les plus fins tacticiens), on arrive tout de même à dégager une certaine jouissance avec des coups bas, des fausses pistes ou des retournements savamment orchestrés par des petits enchaînements bien pensés.
La piste procureur se montre d'ailleurs souvent déterminante, les avantages qu'elle procurent prenant effet avant de possibles fusillades de fin de manche (et la récupération des boîtes de contrebande en fin de partie). C'est une des petites idées qui créent des dilemmes incessants dans MOB : Big Apple (comme protéger vos hommes en voiture, un vrai cauchemar) et qui donnent de la matière à un titre déjà bien riche en subtilités.

Et ce que j'adore dans MOB : Big Apple, c'est l'imprégnation de son thème. Le jeu a beau être très mécanique dans le fond, tout respire ici la mafia, sa violence, la dangerosité du milieu. Que ce soit par les actions que le jeu propose (exterminer des hommes sur la route ou corrompre un procureur, c'est pas commun !) ou par les bouleversement incessants que l'on subit tout au long d'une partie courte mais toujours intense.
L'aspect visuel du titre y fait aussi pour beaucoup. Entre le matériel très qualitatif à base de jetons poker et de meeples très bien travaillés, et un travail d'illustration sobre et au rendu luxueux, il est difficile de ne pas se prendre au jeu de cette petite guerre de gangs en moins de trois quart d'heure.
Alors MOB : Big Apple, une belle surprise du jeu pour deux joueurs de 2022 ? Clairement oui, même si je pense qu'il faut trouver l'adversaire idéal, celui qui vous mettra au défi, qui pourra permettre de générer des parties au dénouement toujours incertain, afin de profiter de tout son potentiel !



