
La richesse du futur Paris de 2046 sera à chercher du côté de son monde numérique. Guy-Roger Duvert en est en tout cas pleinement convaincu, car après un ouvrage sur le sujet, il a réalisé son adaptation filmique (en gérant en plus la bande son) et vient d'en réaliser une déclinaison jeu de société. Le chainon manquant pour vous emmener vous aussi dans son univers ?

Vivons cachés ...
Virtual Revolution est un jeu de lutte d'influence technologique et le contrôle de territoires qui se joue essentiellement sur un grand plateau affichant la ville et ses 7 districts principaux, tous composés de 2 à 3 arrondissements.
Une partie se déroule en 5 manches où chaque joueur va, tour à tour, envoyer l'un de ses 3 meeples directeurs dans un quartier de la ville pour y effectuer l'une des cinq actions majeures du jeu. Mais avant cela, il a le droit d'agir sur sa zone de destination en supprimant un jeton d'influence adverse, ou en profitant de l'absence de concurrence pour migrer l'un de ses jetons, qu'il vienne de son plateau personnel ou d'un autre district.

L'acte le plus simple de Virtual Revolution consiste à réclamer 5 Euros du jeu (action S'enrichir). La deuxième action permet elle de recruter, pour 4 Euros, l'un des 5 agents disponibles de la manche s'il est à portée de son "ouvrier". Il faut savoir que les agents ont pas mal d'utilités en jeu, car en plus d'offrir un pouvoir activable une fois par manche, ils peuvent à tout moment être promus en échange d'un bonus immédiat puis être utilisés en tant que boost sous une action de son plateau personnel.
Un billet de 10 Euros vous offre la possibilité d'installer l'un de vos serveurs dans l'arrondissement actif, pour un regain d'influence local. L'action Créer un Verse vous donne accès au marché de cartes dédiées qui peuvent vous apporter un bonus et des points supplémentaires lors du scoring final vous arrivez à les "charger" (remplir les conditions d'activation indiquées dessus).

Reste à évoquer l'action Faire un don, qui permet de se débarrasser d'une ou de deux cartes Corruption en échange de 1 ou 3 Euros. La bonne gestion de ces cartes est importante puisqu'une fois tous les directeurs disponibles envoyés, le jeu demande de résoudre toutes vos cartes si d'aventure vous en possédez plus de 5 en main à ce moment là. Et si des jetons Immunité peuvent être récupérés durant la partie pour vous servir de jokers, les conséquences sont souvent fâcheuses, que ce soit financièrement ou du côté de vos installations et cartes Verse.
Et ce n'est que le début de vos soucis, car la fin de manche oblige aussi à résoudre une attaque de Nécros, une carte qui génère un malus pour toutes les agences et une contrainte encore plus forte pour le joueur le plus en avance sur la piste Revenus, que l'on déclenche dans la foulée. Reste à effectuer une petite phase de Nettoyage et à enchaîner les manches jusque la fin de la cinquième, qui vient avec une routine particulière.

Après une phase de Perquisition (carte attaque de Nécros particulière), vient le décompte final. Chaque joueur empoche alors 2 PV par jeton du même nom glané durant la partie, 1 PV par tranche de 5 Euros en poche, 1 PV par case sur la piste Revenus atteinte, 2 PV par Arrondissement contrôlé. Les joueurs comptabilisent aussi 10 PV par Titre possédé, cartes spéciales qui s'acquièrent quand vous contrôlez tous les arrondissements d'un district.
Rajoutez à cela des points selon le nombre de Serveurs installés, vos bonus de Cartes Verse et à choisir d'activer une carte Objectif parmi les deux reçues en début de partie, et vous saurez qui est l'agence numérique la plus influente de Néo Paris !

... vivons heureux !
Autant le dire tout de suite, Virtual Revolution n'apporte rien d'innovant au genre du contrôle de zones, et ne vient pas avec une mécanique qui vous fera tomber de votre siège la première fois que vous la verrez se déployer devant vos yeux. Mais des fois un joueur veut juste jouer à un bon jeu de société, et Virtual Revolution a assez de qualités dans le buffet pour vous proposer l'expérience et l'évasion que vous attendez d'un moment ludique.

Difficile de ne pas commencer par la thématisation réussie. Je ne sais pas si c'est parce que je suis un grand fan de la série Deus Ex, ou que le cyberpunk est un univers qui me parle, mais tout participe ici à vous plonger dans une lutte d'informaticiens du futur salement attirante.
Faut dire que partir d'un bouquin et d'un livre qui ont eu leur petit succès, ça aide pour construire un univers logique qui donne envie (même si pour ma part je n'ai rien lu / rien vu de l'œuvre avant d'y jouer). Puis entre le soin apporté au matériel (plateaux perforés, meeples sérigraphiés) et les images sublimes de Benjamin Sjöberg, il y a de quoi terminer de poser son ambiance !

Et côté profondeur de jeu, Virtual Revolution n'est pas en reste. Je ne vais pas vous cacher que la partie baston sur le plateau me laisse un peu perplexe, car il faut sacrément s'investir pour prendre possession d'un arrondissement adverse. Mais le titre offre, à côté de cela, son paquet de stratégies uniques (serveurs, agents, verses) qui, couplé au mode "je picore un peu dans tout", offre assez de leviers tactiques différents pour demander de vrais arbitrages et légitimer l'envie d'y retourner.
Et ce gameplay des plus vivants, le jeu finit par l'asseoir par une interaction ultra affirmée qu'il ne faut en plus, surtout pas sous-estimer. Car je peux vous le dire tout de suite, laisser un joueur prendre le contrôle de tous les districts ou s'accaparer les meilleures cartes Verses sans lui opposer quelconque résistance, et c'est votre défaite assurée. Tout comme céder à la provocation et récupérer des camions de corruption qui vont, tôt ou tard, détruire la moitié de ce que vous aviez mis 3 manches à construire !

On pourrait presque cataloguer Virtual Revolution comme un jeu de développement (et) d'ambiance que cela ne me choquerait pas, et c'est finalement la meilleure publicité qu'on peut lui faire tellement il réussit à apposer une vraie patte ludique à table malgré son apparente "simplicité technique".
Puis pêle-mêle, je dirais que j'aime beaucoup l'iconographie générale du jeu super claire malgré sa densité, moins le fait qu'elle est difficile à lire à l'autre bout d'une table (et c'est dommage, car faut vraiment avoir un oeil partout). J'aime beaucoup le timing qu'impose la promotion des agents, et surtout la gestion des acquisitions des cartes Corruption (une vraie plaie, j'insiste...). Moins le marché des agents limité à 5 quand on est à 4 à table, ou les parties à 2 qui manquent peut-être d'un clan automatique pour dynamiser la vie en ville.

Mais dans tous les cas cela n'empêche pas que j'adore me prendre pour un hacker du futur dans ce Paris futuriste des plus intriguants. Et si vous cherchez ce type d'expérience nul doute que Virtual Revolution ne vous laissera pas indifférent !


