Deux ans après avoir localisé Dice Hospital, un jeu imparfait mais pas désagréable pour autant, Super Meeple ramène de chez Alley Cat Games leur titre Dice Theme Park, une suite slash évolution centrée cette fois-ci sur les parcs d'attractions.
Mode sensations fortes
On retrouve dans cet opus le système phare maison de dés qui représentent des clients (et que l'on ne lancent jamais), avec des états symbolisés par la valeur affichée. Point ici de risque de décès et de gestion de morgue comme le jeu précédent, le nombre correspond "seulement" à leur état de fatigue du moment. Faire interagir un dé avec l'une des tuiles hexagonales (attractions ou magasin) de votre centre de loisirs en développement permanent vous obligera à chaque fois à diminuer sa valeur d'une unité, et atteindre 0 ne vous laissera pas d'autre choix que de lui faire rejoindre la porte de sortie.
Pour être activée, une attraction demande souvent un prérequis. Cela va d'y envoyer 1 à plusieurs dés d'un type spécifique (il y a trois couleurs différente dans Dice Theme Park) à suivre des contraintes de valeurs (un dé bleu supérieur à un autre dé de n'importe quelle couleur par exemple). Il faut savoir par contre qu'un des dés actifs sera toujours "rejeté" gratuitement sur une tuile adjacente, ce qui peut permettre de multiples enchaînements lors de votre phase d'action s'ils sont bien anticipés en amont.
Mais avant de faire évoluer vos visiteurs dans vos installations, le jeu vous demande de révéler simultanément de votre main deux cartes (phase de Planification, I), pour trois conséquences directes.
La première, et peut-être la plus importante, c'est la détermination de l'ordre d'initiative, calculé par l'addition des deux valeurs en haut à droite. Le joueur ayant le plus faible total gagne notamment la primeur de choisir en premier son bus de dés (phase d'Accueil, II), et une nouvelle attraction (phase d'Agrandissement, III) du pool commun.
Et en dehors de décider du petit pécule glané lors du début d'une manche, ces cartes affichent un membre du personnel qui a chacun sa capacité propre. Du guide qui permet de déplacer un de vos clients sur n'importe quelle tuile une fois par manche à la gardienne qui offre de changer la valeur d'un dé, il y a en tout 6 personnages différents qu'il faut savoir jouer au bon moment pour un résultat optimal.
On peut dire aussi que Dice Theme Park n'est pas avare en mécanismes divers. Il embarque notamment un système d'Aménagements, des jetons que vous pouvez acheter lors de la phase d'Amélioration (phase IV) pour déclencher des effets supplémentaires lors de l'activation de vos attractions. Vous pouvez aussi compter sur des Mascottes, qui s'achètent en phase III et peuvent se déclencher une fois par tour pour s'offrir un avantage indéniable. Et le mode "complet" offre un système de cartes Administrateurs, qui donne en début de partie un pouvoir permanent à chaque joueur. Plus des cartes compétences qui permettent de privilégier un pouvoir au lieu des capacités de base de vos Mascottes.
La grande roue du plaisir
Et quelle galère de juger ce Dice Theme Park, vraiment !
Autant l'avouer de suite, j'ai eu un véritable "crush" pour son système d'actions. Quel kiff d'étudier les "forces" de ses dés pour planifier les meilleurs parcours possibles, faire qu'ils passent sur un maximum de tuiles, dans le but d'atteindre le graal, à savoir déclencher toutes ses attractions dans un même tour (en prenant du même coup le maximum de revenus et de points de prestige) !
Cela faisait vraiment longtemps que je n'avais pas été aussi agréablement surpris par un mécanisme "expert" (a.k. demandant d'employer son cerveau à plein régime). Et si j'avais apprécié le système de santé du jeu original, je trouve la recette encore plus fine et goutue ici, avec un ensemble de leviers dense permettant autant de modifier les valeurs de dés que de les déplacer aisément dans son antre (via notamment les jetons Plans).
Tout ceci ne serait pas possible sans la réflexion permanente autour de l'agencement de son parc et le facteur investissement d'améliorations. Autant de concepts hyper thématiques qu'un combo gagnant mêlant prise de tête très bien dosé et un vrai plaisir addictif quand on voit ensuite son parc prendre vie comme on l'espérait.
Pour rester dans le positif, j'aime aussi beaucoup la prime donnée à la simultanéité (qui concerne la moitié des phases d'une manche). Certes, cela peut devenir un terrain miné pour une table d'étourdis ou de mauvais joueurs, mais cela apporte un vrai dynamisme au jeu tout en permettant à la boîte d'assumer complètement son total manque d'interaction directe. Cela peut déplaire mais me convient parfaitement ici, tellement il y a de choses à gérer dans cette version survit aminée.
Et si vous aimez personnaliser votre expérience, vous allez être servis. En plus du double mode de base élargissant le spectre des publics possibles, cette boîte vient avec un lot de modules et de règles additionnels loin de faire de la figuration si vous jouez régulièrement. Rien de novateur à chaque fois, mais des nouvelles améliorations qui savent apporter un vrai renouveau côté tactique, quand le système VIP rajoute une nouvelle façon de scorer aussi légère qu'intéressante stratégiquement.
Des tasses qui tournent trop vite
Mais à côté de ces réussites avérées, le jeu ne semble pas être totalement abouti, et ce à plusieurs niveaux.
J'ai déjà en ligne de ligne de mire ce design global hyper aléatoire, qui alterne des tuiles attractions sublimes, une variété de Mascottes en bois ultra appréciable, à un travail d'illustration sur les cartes qui frôle le désuet. Je ne sais pas si c'est un hommage raté aux jeux 32 bits phares de l'époque ou un souci d'inspiration, mais ce n'est pas beau, ne donne pas envie d'être manipulé. Et ne sert pas une ergonomie qui elle fait parfaitement son travail.
Il y a aussi cette sensation d'un vrai problème de calibrage. Dice Theme Park propose réellement deux jeux dans le jeu, à savoir une première partie où l'on déclenche plutôt aisément l'entièreté de son parc, à une seconde où le seul intérêt est de déclencher ses tuiles de niveau 2, des attractions beaucoup plus rentables qui apparaissent à mi-course. Vous me direz qu'il reste toujours la course à celui qui optimise le mieux (et vous n'avez pas totalement tord), mais cela donne l'amère impression que l'initiative n'est pas aussi déterminant que cela, et que l'on pourrait choisir n'importe quelle attraction ou compétence que cela ne changerait pas fondamentalement sa partie.
Et cela va de pair avec des choix de game design assez étonnants, comme avoir figé dans le marbre la composition des bus en début de chaque tour. Ok cela évite à un joueur de récupérer trois dés de valeur faible quand un autre récupère deux 5 et un 6. Mais cela finit par briser définitivement la tension que pourrait générer cette fameuse course à l'initiative.
Dice Theme Park est loin d'être un mauvais bougre, rassurez-vous. Mais je n'arrête vraiment pas de me dire qu'il aurait pu s'éviter des complexités inutiles (capacités de personnages, mascottes par exemple) pour privilégier davantage son point fort, à savoir l'aménagement et l'activation du parc. Des achats multiples, des tuiles plus variées avec des contraintes de connexion de routes, des espaces repas qui redonnent de la "vie" aux visiteurs, ... il y avait assez de quoi faire pour donner de la complexité tout en se montrant plus fluide et encore plus thématique.
Cela ne m'empêchera pas de rejouer à ce titre si on me le propose, rien que pour son système d'actions tout simplement génial. Mais j'attends de pied ferme le jour où un éditeur sortira ce mix entre Dice Theme Park et Meeple Land (le test ici) qui comblerait sans nul doute mon cruel besoin d'un jeu de gestion de parc de loisirs parfait !